Gadgets en tous genres, vêtements ou encore jouets à prix imbattables, Wish est devenu en quelques années un poids lourd de l’économie numérique. Créé en 2013, le site de vente en ligne américain revendique aujourd’hui pas moins de 100 millions de clients. Cette incroyable success story est aujourd’hui mise à mal par un ordre de référencement confirmé par la justice française. Une première mondiale qui doit alerter les entrepreneurs du web sur la mise en ligne de produits non conformes. Explications avec le cabinet Touati La Motte Rouge, avocats spécialisés en numérique.
Début 2021, la DGCCRF lance une grande étude sur cent quarante produits proposés par la plateforme de vente en ligne Wish. Le résultat du procès-verbal dressé le 25 mai 2021 est édifiant.
45 % des jouets vendus par le géant américain ne respectent pas les normes en matière de sécurité. Pour les appareils électroniques, ce chiffre atteint même 95 %. Des guirlandes électriques sont par exemple susceptibles de provoquer un incendie. Au rayon bijoux fantaisie, le constat est également alarmant. 62 % des modèles étudiés par la DGCCRF sont jugés dangereux pour les consommateurs.Le procès-verbal souligne donc deux éléments principaux :
Pour le ministre de l’Économie, cette situation est intolérable et préoccupante. Le 15 juillet 2021, une injonction de la DGCCRF ordonne alors à Wish de se mettre en conformité avec la loi française dans les deux mois. Une sollicitation qui, d’après le gouvernement, est restée sans réponse.
Dans un communiqué de presse, Wish réaffirme son positionnement en tant que plateforme de marché. Si la plateforme indique vouloir fournir des produits de qualité, il souligne n’avoir « aucune obligation légale d’effectuer des contrôles ».
Par ailleurs, Wish soulève l’incapacité technique d’un tel contrôle. Le site accueille en effet près de 500 000 vendeurs pour seulement 875 employés. Rappelons que la plateforme a généré pas moins de 2,54 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2020.
Après plusieurs mois d’attente, le 23 novembre 2021, le gouvernement a demandé à Google, Qwant, Microsoft et Apple de déréférencer l’adresse internet de Wish ainsi que son application de leurs moteurs de recherche et de leurs magasins en ligne. La société ContextLogic, exploitant le site Wish, a déposé un recours devant le tribunal administratif de Paris pour faire suspendre la décision ministérielle. Cette demande a cependant été rejetée et le déférencement de Wish est aujourd’hui effectif.
Cette décision a eu un véritable retentissement sur les activités de la société qui réalise pas moins de 7 % de son chiffre d’affaires en France. Le cours de son titre a notamment subi une forte chute en bourse.
L’affaire Wish est à marquer d’une pierre blanche. C’est en effet la première fois que le ministère de l’Économie met en application l’article L. 521-3-1 du Code de la consommation. Pour mieux comprendre les risques encourus par les plateformes d’intermédiation, revenons en détail sur les différentes actions et sanctions possibles.
Sur base des articles L. 521-1 et L. 521-2 du Code de la consommation, la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est autorisée à enquêter, et contrôler les plateformes.
Si elle constate une violation du droit de la consommation, elle peut les enjoindre de se conformer à ses obligations ou de cesser ses agissements illicites. Ces dispositions peuvent ainsi être utilisées si vous inscrivez une clause abusive dans vos conditions générales de vente.
Par ailleurs, en cas de pratiques commerciales déloyales ou de vente de produits dangereux, la DGCCRF peut mettre en application l’article L. 521-3-1 du Code de la consommation. Ce dernier comprend trois niveaux de sanction.
Bon à savoir : d’autres plateformes concernées !
C’est notamment le cas de la société Abritel, proposant de la location saisonnière. Cette dernière a été assignée devant la justice le 17 août 2021 pour informations trompeuses. La DGCCRF a en effet constaté un décalage entre le message commercial de la société et ses conditions générales. Des enquêtes sont également en cours pour d’autres plateformes suite à des plaintes de consommateurs notamment pour escroquerie.
La DGCCRF formule un certain nombre de bonnes pratiques à mettre en place par les plateformes de marché.
Elles devraient tout d’abord s’assurer de l’identification claire et précise des produits vendus par son intermédiaire. Les annonces doivent par ailleurs contenir toutes les informations obligatoires, notamment en termes de marquage de sécurité.
Par ailleurs, les produits dangereux et/ou non conformes ne devraient pas être mis en ligne par la plateforme. Cela suppose toutefois un contrôle en amont parfois difficile, voire impossible.
En cas d’identification de produits manifestement non conformes, la plateforme devrait les retirer dans un délai de 48 heures maximum. Elle doit également veiller à ce que ces offres ne réapparaissent pas.
Enfin, le site doit informer les consommateurs ayant acheté un produit dangereux et leur fournir des informations sur la marche à suivre.
Pour limiter les risques, il est également primordial de faire appel à un avocat spécialisé dans les activités numériques. Ce dernier vous accompagne notamment dans la rédaction de vos CGV et dans la mise en place des bonnes pratiques.
La loi pour la confiance dans l’économie numérique n°2002-575 (dite « LCEN ») du 24 août 2021 précise « Les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère manifestement illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ».
En tant qu’opérateur de plateforme, vous pouvez donc sans risque ne pas intervenir pour retirer ou modifier un contenu qui n’apparaît pas comme manifestement illicite. A contrario, si vous êtes informé de la non-conformité d’un produit, vous devez agir.
Besoin de conseils ? Le cabinet Touati La Motte Rougeaccompagne de nombreux fournisseurs de services d’intermédiation en ligne et opérateurs de plateforme. Notre équipe spécialisée demeure à votre écoute pour vous assister dans le cadre de votre mise en conformité avec la loi française et éviter ainsi un déférencement. Pour plus d’informations ou pour une première rencontre, contactez-nous ici sans tarder.